Aujourd'hui, Marie51 vous entraine à la découverte du Fort des Ayrelles, bâti à Villers-Semeuse, dans les Ardennes, en région Grand-Est, en France. Le fort des Ayvelles avait pour fonction principale, d’interdire à l’ennemi, l'accès aux 4 voies ferrées de Reims-Paris, Montmédy-Metz, Hirson-Lille et Givet-Belgique, rejoignant les gares de Mohon et Charleville. Seul ouvrage de Séré de Rivières dans le département des Ardennes, le Fort des Ayrelles dispose de dimensions imposantes : c’est un puissant fort d’arrêt.
C'est un ouvrage militaire, de type Séré de Rivières, construit de 1877 à 1980, situé sur une crête, qui surplombe la Ville de Mézières, sur les territoires de 2 communes : Villers-Semeuse et les Ayvelles. Il comprend un ouvrage principal, le Fort, et un ouvrage annexe, de taille plus petite, la Batterie, les 2 étant reliés par un chemin protégé, long de 600 mètres.
Le Fort des Ayvelles se retrouva, pourtant, en première ligne, lors de l’Invasion Allemande, au mois d’Août 1914. La Garnison était composée de 150 hommes (6 Officiers, 12 Sous-Officiers et de 132 soldats. L'Armement de rempart comporte 2 canons de 90 mm, 2 mortiers lisses de 15 cm et 2 mitrailleuses mdl 1907. L'Armement de flanquement comporte 2 canons révolvers et 2 canons de 12 culasses. L'Organe cuirassé comporte 1 casemate Mougin de 155 mm L.
== L'Entrée Unique ==
CC BY-SA 3.0 - Photo de Adri08
On accède à l’intérieur de la forteresse par une entrée unique. Un corps de garde de contrescarpe, flanqué de coffres de tirs, protège la porte d’accès. Un pont dormant à deux piles en bois, traverse le fossé et se termine par un pont-levis, à bascule en dessous, pouvant fermer l’accès. Deux casemates de chaque coté, de cette seconde porte permettaient de tirer depuis des créneaux de mousqueterie. L’entrée a été particulièrement soignée. C'est un pastiche, de style Louis XIII, où l’on peut lire sur le fronton « 1878 Fort des Ayvelles ». L’intérieur de la voûte suivante est percé des 2 côtés, de plusieurs ouvertures de tir.
== L’enceinte ==
L’ouvrage est formé d'un plan carré, avec 4 faces de 250 mètres de côté, entouré d’un large fossé de 10 m de large. Les 2 faces, extérieures et intérieures, sont maçonnées : la contrescarpe fait 7 m de haut et prend la forme d’arceaux en décharge. L’escarpe, de 6 m de haut, est semi-détachée et protège le chemin de ronde. Le fossé est protégé par 2 caponnières doubles aux saillants au Sud et Nord.
== Les Echauguettes ==
Le Fort des Ayvelles présente la particularité, unique en France, de disposer sur sa caponnière Nord, de 2 échauguettes en encorbellement, qui sont placées à l’extrémité des orillons. Ces postes d’observation n'ont qu'un but décoratif, uniquement.
== La Casemate cuirassée ==
Les 20 banquettes d’artilleries, en extérieur sont appuyées par une casemate cuirassée, nommée « casemate Mougin » du nom de son concepteur, qui furent livrées sur le site, le 23.11.1882. Orientée en direction de Boulzicourt, au Sud-Ouest, elle abrite un puissant canon de 155 long de Bange (long de 4,2 mètres, il est capable de tirer un obus de 155 mm par minute à un maximum de 9 200 mètres) installé sur un affût lui-même posé sur un chariot. Celui-ci est placé sur deux rails concentriques lui permettant un angle de tir de 60°. Cette puissante arme, installée en seulement dix exemplaires sur les forts Séré de Rivières, est présente en double exemplaire, l’une au Fort et l’autre à la Batterie. On accède à la casemate cuirassée par la gaine enveloppe et une galerie d’accès de 2,5 mètres de large. La pièce d’artillerie est protégée par un cuirassement en fonte dure composé de quatre voussoirs de dix tonnes chacun et d’un bouclier de 23 tonnes. Une embrasure aménagée dans ce dernier permet le tir, mais elle constitue également le point faible du système (l’ennemi est susceptible de pouvoir l’atteindre). C’est la raison pour laquelle un mécanisme de verrou permettant de masquer ou démasquer la vue est aménagé : ce verrou de 7 tonnes en fonte dure, maintenu en équilibre grâce à un contrepoids, est mû par 4 servants, actionné par des treuils dans deux casemates latérales. Un système de pile saline permet d’éviter le tir accidentel du canon lorsque le verrou masque la vue. Deux autres casemates latérales servent d’abri aux artilleurs lors du tir (contre la poussière et le bruit). La poussière est captée par un large puits d’aération aménagé au plafond.
== La Poudrière ==
Deux magasins à poudre identiques sont aménagés dans le fort, avec une capacité de 80 tonnes de stockage de poudre noire chacun. Cette poudre, entreposée dans des caisses étanches en laiton de 50 kilogrammes, servait à la confection des obus dans des locaux de chargement aménagés à proximité. Ces importantes quantités expliquent les dimensions des deux salles : 19,6 mètres de long, 6 mètres de large et 5 mètres de haut, le tout sous une épaisseur de terre de 8 mètres. Le lieu étant à haut risque, de nombreuses mesures de sécurité sont mises en place pour prévenir les explosions, mais aussi l’humidité qui rendait la poudre noire inutilisable. L’accès à l’intérieur de la poudrière se fait par un vestibule d’entrée, servant aux soldats, à enfiler la tenue de manutention, ne comportant aucune pièce métallique susceptible de produire des étincelles. Deux épaisses portes blindées fermées à clé interdisent l’accès. Le système d’éclairage est basé sur des créneaux de lampe aménagés dans les murs, abritant une lanterne à colza ou à pétrole séparée du vestibule et de la poudrière par du verre de deux centimètres d’épaisseur. On trouve une telle ouverture dans le vestibule, et trois autres dans le magasin lui-même, limitant grandement l’apport de lumière. Pour lutter contre l’humidité, un vide sanitaire est aménagé sous la poudrière. Le sol, enduit de brai minéral, est recouvert d’un plancher surélevé ventilé par huit ouvertures. La voûte est elle aussi recouverte de ce brai minéral sur sa face extérieure, tandis que la face intérieure est recouverte de chaux blanche présentant le double avantage d’être imperméabilisant et de refléter la lumière venant des trois lanternes. Deux ouvertures équipées de volets en bois et reliées au puits d’aération permettaient le contrôle de l’hygrométrie de la pièce. Des galeries sont aménagées autour de la poudrière afin de ventiler les abords et empêcher l’humidité de s’infiltrer par les côtés. Enfin, un câble métallique fixé à des crochets au plafond remonte par la gaine d’aération où il est relié à un paratonnerre afin d’éviter les accidents liés à la foudre.
== La gestion de l’eau ==
L’apport d’eau en quantité suffisante et régulière est un élément vital pour le fort des Ayvelles. Situé au sommet d’une colline, il fut nécessaire de creuser des puits profonds afin d’atteindre une nappe d’eau : les deux puits ont une profondeur de près de 26 et 29 mètres et permettent d’apporter un débit moyen de 4 m3 chacun. Sur chacun des puits, une pompe aspirante permet d’alimenter un système de tuyauterie en plomb pour diriger l'eau vers une citerne souterraine de stockage de 473 m3 de capacité, ou une petite citerne permettant d’alimenter des lavabos. L’eau stockée dans ces citernes est destinée à assurer au fort une capacité de 6 mois lors d’un siège, avec des rations réduites pour les soldats et les chevaux.
== Les Places d’armes==
Quatre places d’armes sont aménagées pour l’infanterie aux quatre saillants du fort : sud, est, nord et ouest. Elles sont protégées par un parapet permettant aux fantassins de tirer sur l’ennemi et de se mettre à couvert. Des mortiers pouvaient également y être installés pour battre le glacis. Sur la place sud, l’accès à l’espace de tir se fait par un escalier en pierre bleue, absent sur les autres places. Les places sud et nord permettent d’accéder, par le biais d’un tunnel, à l’intérieur des deux caponnières. La place d’armes sud est cependant la plus large du fort, et on y trouve en plus du passage vers la caponnière trois casemates qui abritaient notamment la forge et une écurie pour six chevaux.
== La Défense du Fossé ==
Le fossé entourant la forteresse est protégé sur ses 4 faces par 2 caponnières doubles, aux saillants Sud et Nord. L’accès à ces caponnières se fait par 2 passages voûtés accessibles depuis les places d’armes. Ces énormes structures, aménagées de trois grandes visières maçonnées, permettent à des canons de 12 culasse et des canons revolver Hotchkiss de 40 mm de tirer des munitions antipersonnel dans le fossé. La tête de caponnière, appelée orillon, permet le tir d’infanterie.
== Le Fort aujourd’hui ==
Au fil des décennies les entraînements du 3e régiment du génie se font à leur tour plus rares. À la fin des années 1980, un groupe de bénévoles se met en tête de remettre le fort en état. L’association du Fort et de la Batterie des Ayvelles (A.F.B.A) naît en 1989. La tâche est colossale : les deux voûtes permettant d’accéder à la rue du rempart et aux zones centrales (casernements, poudrières) sont percées, laissant déverser des tonnes de roches et de terre. De nombreux murs se sont effondrés et les tests d’explosifs sur la place d’armes sud ont détruit une grande partie de ce qui s’y trouvait. Trois ans seront nécessaires pour déboucher le passage d’entrée et deux autres pour le second passage. Celui-ci étant libéré, l’accès à l’intérieur devient enfin possible. Cependant, les voûtes, trop étroites et trop basses, limitent l'utilisation d'engins et un nouveau pont, en terre cette fois, doit être érigé à l’entrée pour leur permettre l’accès.
C’est un travail de plus de 25 ans qui va donc se jouer pour aboutir au fort tel qu’il est aujourd’hui. Les galeries comblées sont vidées, les casemates détruites peu à peu reconstruites, les cheminées remontées, les passages sécurisés. Ces investissements permettent finalement d’aboutir à un circuit qu’il est possible de proposer à la visite. En 2004, le Conseil Général devient propriétaire du domaine des Ayvelles et fait procéder à la dépollution complète du site, de 37 hectares, et des deux ouvrages. Il permet toutefois à l’association de poursuivre sa mission tout en lui apportant une assistance matérielle et financière.
En 2011, l’association se mue en un Groupement d’Économie Solidaire, dénommé « Ardenne Patrimoine Insertion » (A.P.I), qui emploie 30 salariés en contrats d’insertion. Les équipes de salariés en insertion se divisent, entre l’entretien des espaces verts (37 Ha de parc et 6 Ha sur le fort), la maçonnerie (reconstruction de la place sud) et l’accueil des touristes. Les bénévoles et salariés travaillent désormais ensemble pour faire du Fort des Ayvelles une destination touristique de premier choix dans les Ardennes. Ce site historique, situé au cœur d’un domaine boisé bien entretenu et équipé d’installations de pique-nique, de sentiers, d’aires de jeux, attire des citadins à la recherche d’un endroit à l’écart des activités, le tout à proximité immédiate de Charleville-Mézières. Le fort des Ayvelles est en outre le théâtre d’événements organisés par l’association pendant la période estivale : week-end Belle Époque lors de la Fête de la Musique et un autre week-end à thème fin septembre. D’autres événements plus modestes sont organisés à la Toussaint, Pâques, pour le plus grand bonheur des visiteurs. La saison estivale est également l’occasion de participer à des visites guidées.
Adresse du Fort des Ayvelles
08000 Villers-Semeuse
Tel : 06.71.95.03.64
Visite guidée (groupes - 10 personnes) les mardi, jeudi et samedi matin. Sur réservation uniquement.
Ses Coordonnées par GPS :
49° 43' 36" Nord, 4° 44' 15" Est
Mise à jour le 3/08/2023
Marie51
Retour